Les femmes paient leurs produits plus chers que les hommes !

RTS la 1ère - taxe rose - 2014-11-18Le collectif Georgette Sand, révélé par le Parisien ce 3 novembre, dénonce une « WomanTax« . Le marketing du genre, en segmentant le marché entre hommes et femmes, véhiculerait des stéréotypes, stimulerait la consommation et infligerait un surcoût aux
femmes, lesquelles n’ont pourtant pas plus de revenus que les hommes, mais sont incitées à dépenser plus ».

Ainsi, le collectif remarque qu’un gel de rasage d’une marque consommateur coûte 6,20 CHF pour une femme et 3.45 CHF pour un homme. Mais cela ne s’arrête pas aux produits de grande consommation, puisque cela touche le textile, les coiffeurs, …

Intéressant sujet sur la RTS du mardi 18 novembre à découvrir sur le lien de la RTS 

Voici les réponses aux 5 questions que Katia Shaer journaliste à la RTS m’a posé dans le cadre de cet interview :

RTS : Comment expliquer que les femmes soient prêtes à payer plus ?

OBA : Elles ne le sont pas car elles ne sont pas bêtes. Personne ne l’est d’ailleurs, et stigmatiser les femmes est maladroit et réducteur car il y a autant de femmes différentes que d’hommes différents.

En fait, chacun d’entre nous est prêt à payer plus pour un produit ou autre car nous avons chacun nos motivations propres.

Il y a cependant plusieurs raisons qui font qu’une personne est prête à payer plus.

  • Le manque d’information : dans le cas des produits présentés dans l’étude, les femmes n’ont pas conscience de cet écart parce qu’elles ne peuvent pas comparer les produits pour Hommes et pour Femmes car ceux-ci ne sont souvent pas l’un à côté de l’autre dans les magasins.
  • La confiance : l’industrie jouit encore d’une confiance « naïve » de la part des consommateurs/trices qui partent du principe que s’il existe une version pour hommes et une version pour femmes, c’est qu’il y a une bonne raison…
  • Nous pourrions évoquer nombre de raisons qui seraient toutes liées à des stéréotypes, des généralités voire du sexisme, comme la différence de sensibilité, …

Mais une des raisons de ces stéréotypes vient de nous, de notre éducation et de la pression sociale qui façonne tous les jours notre façon de voir les hommes et les femmes et de leur attribuer des « rôles ».

RTS : En quoi les produits pour femme sont-ils « positionnés » différemment (comment) ?

OBA : Le Marketing du genre ne peut pas à lui seul expliquer une différence de prix. Cette différence doit être justifiée par une valeur ajoutée, au risque de ne pas pouvoir survivre très longtemps.

Par contre, un Marketing basé sur les motivations d’achat, la sensibilité aux arguments rationnels ou émotionnels, pour mettre en valeur 2 produits différents, justifie un prix différent.

Dans ce cas le Marketing utilise la segmentation pour influencer le rapport entre l’offre et la demande et augmenter la différence de perception entre un produit et ses concurrents afin d’optimiser leur attractivité et donc le prix que l’on sera prêt à payer pour les acquérir.

 RTS : Comment expliquer que ce modèle « d’affaires » perdure ?

OBA : Principalement par le manque d’information du consommateur, le manque de transparence des industriels, ainsi que par l’habileté de ces derniers à créer des positionnements répondants à des besoins spécifiques. Le risque étant que le produit ne fasse que « prétendre » répondre à un besoin, mais soit dénué de toute valeur ajoutée spécifique.

 RTS : Est-ce que c’est tout simplement « socialement accepté » ?

OBA : Oui et non.

Oui, car certains écarts ont été socialement construit par notre éducation (le cas des coiffeurs) ou qu’ils ne sont pas remis en question par manque de moyens (comparaison impossible), de curiosité ou de naïveté. Mais parfois simplement car ils se justifient pour des raisons concrètes.

Non, car lorsque l’on s’en rend compte, on voit bien que certains écarts sont inexplicables et donc inacceptables.

Mais c’est aux consommateurs de réguler le marché (changer son comportement d’achat) et non à l’entreprise dont le but principal est de maximiser son profit.

 RTS : On parle de « taxe rose » pour les produits féminins – qu’en pensez-vous ?

OBA : On peut aussi parler de « taxe bleue » pour les produits masculin (pensez aux sites de rencontre payants pour les hommes et gratuits pour les femmes), de « taxe or » pour les riches qui paient des produits de luxe bien plus que ce qu’ils ne valent intrinsèquement car ils portent une marque prestigieuse au bénéfice intangible…

Tout est question de cible, de concurrence, de positionnement, de valeur ajoutée réelle ou perçue.

C’est le travail du Marketing que d’optimiser cette « taxe » pour optimiser ses profits et c’est aux consommateurs d’être vigilants et critiques pour ne pas se laisser abuser.

Articles à l’origine de ce sujet :

http://www.tagesanzeiger.ch/wirtschaft/konjunktur/Frauen-muessen-fuer-dieselben-Produkte-mehr-zahlen/story/24928386

http://www.nzz.ch/nzzas/nzz-am-sonntag/teures-frausein-1.18425957